Joséphine Baker et la banane au Panthéon

Joséphine Baker 1          Qui aurait dit que les portes du Panthéon s’ouvriraient un jour pour accueillir une noire qui, il y a quelques décennies, dansait avec une ceinture de bananes – ces bananes qu’en ce XXIe siècle, à Angers comme sur les stades de France, on jette encore à ceux dont la couleur de peau évoque un monde bien sauvage à la France blanche ? Les populations de Biarritz, qui ont choisi de nommer un de leurs quartiers La négresse afin d’avoir tous les ans l’occasion de se moquer de la tenancière noire du bordel local à l’époque de Napoléon, doivent être mortes de rire !

Joséphine Baker double          Avec l’entrée d’une négresse au Panthéon en ce XXIe siècle, tous ceux qui pensent que les termes France et Noir sont incompatibles trouveront sans doute l’occasion belle pour laisser s’exprimer violemment ou sournoisement leur haine épidermique à l’égard des populations noires de France. Cette mère bretonne et sa fille, qu’elle a incitée à hurler « à qui est la banane ? c’est pour la guenon pour qu’elle grandisse ! » au passage de Christiane Taubira, ont désormais une raison de crier à la trahison de la France blanche. Les années à venir nous promettent-elles les pires moments du racisme français, de même que l’élection d’Obama a ravivé le racisme américain ?

          L’entrée de Joséphine Baker au Panthéon est l’occasion de rappeler qu’il ne faut pas oublier que ce qui se passe en France en 2021, que tout ce qui se passera en France en 2022, 2023… était déjà inscrit dans les faits de notre histoire nationale il y a à peine huit ans : la violence de la haine de l’Autre !

Aux parents dont les enfants deviennent des racistes à 10 ans, je dédie 

ce billet de François Morel, adressé en novembre 2013 sur France Inter

           à la petite bretonne raciste (qui a fêté ses 18 ans en 2021)

Mais qu’est-ce que tu vas faire de ta vie, petite c… ? Déjà si jeune et déjà percluse de ressentiment, de violence larvée, de médiocrité, de bêtise, qu’est-ce que tu vas faire de ta vie ? Quel avenir nous promets-tu ? Oui, petite c…, dans quel marigot insalubre, dans quel bourbier pernicieux, dans quel marécage de pensée rance et écœurante vas-tu te mouvoir le reste de ta vie ?

Toi qui au compteur de ton existence marque à peine dix ans, toi qui, […] te croyant amusante, te croyant pénétrante, imbécile, te croyant indocile devant le palais de justice d’Angers, a hurlé, une peau de banane à la main : c’est pour qui la banane ? C’est pour la guenon ! Te rendras-tu compte un jour, pauvre petite idiote, de l’ignominie de ton geste, de la honte de tes paroles, de l’indignité de ta pauvre attitude ? Sais-tu la désolation que ressentiraient en te voyant, incrédules et atterrés, tous ceux qui un jour se sont battus pour que sur les frontons de la mairie, de l’école publique – que sans doute tu as tort de ne pas fréquenter – on puisse écrire ces mots si simples qui sont pourtant un programme, un objectif, un idéal : Liberté, Égalité, Fraternité ? »

Joséphine Baker 3         Les autorités de notre pays ne doivent jamais oublier qu’il leur appartient de montrer à toute la nation que les Français noirs ont aussi besoin de références respectables et respectées. Panthéoniser, oui ; mais ne pas manquer de préciser que cela est une ferme volonté de faire avancer la connaissance des Autres pour mieux respecter leur différence. On ne combat pas le racisme avec de belles paroles mais avec des exemples valorisants et des outils pédagogiques qui montrent les armes qu’emploie ce fléau pour avancer dans la société.

Raphaël ADJOBI

4 commentaires sur « Joséphine Baker et la banane au Panthéon »

  1. Excellent article très touchant et qui éclaire l’esprit de tous ceux qui, au quotidien combattent pour une société plus humaine
    Merci à la francenoire
    pascal

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