Le lycée Philippe Tissié à Saverdun (09 – Ariège) accueille « L’invention du racisme »

Saverdun 1       L’événement mérite d’être souligné : grâce au dispositif Pass culture mis en place par le ministère de l’Éducation nationale et de la culture, le lycée Philippe Tissié à Saverdun (Ariège 09) a pu demander l’intervention de l’association La France noire, lui permettant ainsi – pour la première fois de son existence – de présenter une de ses expositions à près de 800 kilomètres de son siège social (Joigny – 89) ! Tous les enseignants de cet établissement étaient d’accord avec nous pour reconnaître que ce dispositif rapproche la culture des campagnes ! La culture ne doit plus être le privilège des grandes villes. Nous avons même eu le grand plaisir d’entendre un collègue dire que la culture ne doit pas se limiter au patrimoine mais s’ouvrir aux connaissances qui interrogent notre conscience quant à la qualité de notre relation avec l’Autre. Très bien vu, cher collègue !

          Vous imaginez donc que ce voyage au sud de Toulouse, la ville rose, fut pour La France noire un vrai périple. Une nuit à Châteauroux à l’aller, et une une autre à Brive-la-Gaillarde sur le chemin du retour – une fois notre prestation de la journée du mardi 21 mars terminée. Après la nuit de repos dans cette ville, temple du rugby français, il a fallu faire une halte dans la charmante ville d’Issoudun pour déjeuner avant la dernière partie du parcours vers Joigny.

Saverdun 2          Quel grand plaisir de voir tous les enseignants enthousiastes, montrant un grand intérêt pour notre travail ! Les échanges furent forcément très riches : le professeur documentaliste voyait déjà le profit qu’il fera, dans un futur projet, de la partie de notre travail consacrée au racisme dans la publicité ; un collègue n’a pas hésité à rappeler aux élèves l’importance de l’histoire dans le développement de chaque individu – rejoignant ainsi une collègue qui a insisté sur l’importance d’avoir des connaissances pour apprécier les discours ambiants ; un autre collègue a dit combien son épouse, chef d’établissement, sera heureuse d’avoir des informations sur notre exposition. Quant au surveillant, il voyait dans cette exposition des arguments pour désamorcer les conflits entre les élèves internes de l’établissement. Indubitablement, tous ont vu dans l’attention des élèves que le racisme n’est tabou que dans l’esprit des adultes et nullement dans celui des jeunes.

          Devant tant de discours enthousiastes, la déléguée culture a exprimé, au moment de nous quitter, son désir de nous solliciter à nouveau pour rencontrer – en septembre ou en octobre – les élèves des deux établissements où elle enseigne.

          Merci à toutes et à tous pour vos belles appréciations qui ont rendu notre bref séjour bien agréable.

Raphaël ADJOBI

IMAGES NOIRES : la représentation des Noirs dans la bande dessinée mondiale (Fredrik Strömberg)

L'image du Noir en BD          Chaque fois que l’on parle des canaux de vulgarisation du racisme, les chercheurs et le commun des citoyens pensent immédiatement aux expositions coloniales et aux images de propagande qui ont appuyé les théories racistes des pseudo-scientifiques du milieu du XIXe siècle. Personne ne pense à la force extraordinaire de la bande dessinée qui permettait à tout le monde – jusqu’aux confins des campagnes les plus reculées d’Europe et des Amériques – de partager les images et les opinions des racialistes puis des racistes à l’égard des Noirs ! Voilà l’originalité et le grand intérêt du livre de Fredrik Strömberg, journaliste et historien spécialisé dans la bande dessinée.

          Images noires témoigne de l’extraordinaire popularisation des stéréotypes négatifs du Noir durant près de deux siècles dans l’imaginaire des Européens, contribuant ainsi à l’enracinement du racisme en Occident et dans le reste du monde. Le livre commence par une excellente introduction de l’auteur qui, tout en indiquant sa motivation et la méthode de travail choisie, suscite immédiatement l’intérêt du lecteur en donnant à la fois une brève histoire de la bande dessinée – exemple : le passage du texte sous l’image à la bulle – ainsi que le public visé par les auteurs selon les époques. Il ne manque pas d’y ajouter une brève présentation des 7 stéréotypes du Noir soigneusement entretenus dans l’imaginaire des Blancs jusqu’en ce XXIe siècle.

          De l’invariable représentation des Noirs depuis le milieu du XIXe siècle comme « un rond noir avec deux saucisses au milieu pour lèvres » – formule du dessinateur noir Ollie Harrington – les États-Unis sont passés, après les années 1950, à des images plus réalistes devant « les protestations répétées de la NAACP et des travailleurs des droits civiques » qui ont fini par rendre ces images inacceptables. Par contre, en Europe où les Noirs constituent une infime minorité et ne pèsent donc pas lourd dans la balance politique et médiatique, on a allègrement perpétué ces stéréotypes avec lesquels les Blancs se sentaient très à l’aise. Il suffit de voir quelques publicités du XXIe siècle pour s’en convaincre. C’est donc à partir du XXe siècle que certains aspects de ces stéréotypes furent transférés sur des animaux anthropomorphes tels que Krazy Kat, Félix (le chat), et plus tard Mickey Mouse. Une adroite façon, bien connue, d’aborder un thème difficile à traiter dans un contexte réaliste. Tous ces animaux étaient donc noirs par procuration, puis certains ont évolué. On remarque aussi que, quand les personnages devenaient trop célèbres ou inacceptables, on les stéréotypait moins afin d’en faire des héros neutres, sinon blancs. Ainsi, on note que dans les aventures de Little Nemo in Slumberland, datant du début du XXe siècle, le garçon nommé le Jungle Imp (Diablotin de la jungle!) qui partageait la vedette avec le petit garçon blanc, avait la peau sombre, s’exprimait dans un langage incompréhensible, portait un pagne et avait des lèvres énormes. Mais quand Nemo fut adapté en dessin animé dans les années 1980, la peau du Diablotin de la jungle était devenue bleue ! De même Sam et Sap, le groom noir et son singe de Rose Candice datant de 1908 devient 30 ans plus tard Spirou le groom blanc avec un écureuil pour compagnon !

Images noires 2          Quant à Tarzan, il a façonné pour longtemps l’imaginaire des Européens. « Enfant élevé par les nobles animaux de la jungle africaine », avec lui, le continent africain est une seule nation, consistant uniquement en jungles habitées par des sauvages sur lesquels il règne. Une conception du continent qui a provoqué les protestations des Africains devant les Nations Unies. Mais pour tous les racistes de ce XXIe siècle qui veulent continuer à colporter les stéréotypes sur les Noirs, il leur suffit de dire qu’ils ne sont pas racistes et ils sont aussitôt pardonnés. C’est presque drôle d’entendre chacun dire : «  je le connais, il ne peut pas être raciste ! » Ici, on distribue la communion aux Blancs sans confession.

          A vrai dire, le racisme persiste à cause de la profonde ignorance de l’histoire de son invention et de son enseignement durant deux siècles. Aussi, il convient de prêter attention quant à la manière de lutter contre ce fléau préconisée par l’auteur : « A mon avis, ce n’est qu’en identifiant, en étudiant et en dénonçant le racisme du passé que nous pouvons dénoncer et combattre celui d’aujourd’hui » ! Fredrik Strömberg donne donc pleinement raison à La France noire qui, avec ses expositions, remonte dans le passé pour montrer aux jeunes générations la source du racisme qui coule parmi nous, et ce afin de les en préserver.

Raphaël ADJOBI

Titre : Images Noires / éd. PLG, janvier 2010.

Le lycée Saint-Germain à Auxerre (89) accueille « L’invention du racisme »

Saint-Germain 89 fev. 2023 A          Du lundi 20 au vendredi 24 février 2023, le lycée Saint-Germain à Auxerre (89 – Yonne) a accueilli pour la deuxième fois une exposition de La France noire. Les professeures documentalistes, en accord avec le proviseur de l’établissement, ont tenu à profiter du Pass culture pour offrir aux jeunes l’occasion de découvrir les conditions dans lesquelles est né le racisme, et comment s’est organisée sa propagation.

          Il n’est pas inutile de dire ici que les adultes trop soucieux de la quiétude intellectuelle des élèves les privent de connaissances. Par le passé, c’est par le même souci de la quiétude intellectuelle des femmes et des esclaves qu’on les a éloignés des livres pour les priver de connaissances afin de les maintenir dans la sujétion des mâles et des maîtres. Que ces adultes-là sachent que c’est un réel plaisir de voir les jeunes surpris de découvrir l’origine du racisme et aussi d’avoir pour la première fois – grâce à notre exposition – l’occasion de rattacher des images des comportements des hommes aux théories des racialistes (des inventeurs des races humaines) du XIXe siècle.

Saint-Germain 89 fev. 2023 B          En effet, quand les jeunes prennent conscience de l’ampleur de l’immixtion du racisme dans la science, dans la publicité jusqu’en ce XXIe siècle, dans les actes devenus populaires comme jeter des bananes aux joueurs noirs sur un terrain de football ou se décaper la peau pour la blanchir, ils ne peuvent que se poser cette question : comment lutter contre le racisme ? Voici la réponse de l’un d’entre eux à son camarade qui a posé la question : « Je ne crois pas qu’en quelques décennies ou même en un siècle on pourra faire disparaître le racisme. Il est trop profondément ancré dans nos sociétés ». Devant la classe montrant un visage perplexe, la réponse du conférencier s’imposait : « Ne nous soucions pas du temps que cela prendra. L’essentiel est de commencer à semer des connaissances montrant comment le racisme s’est construit et comment il s’exprime encore aujourd’hui. Et c’est ce que fait l’association La France noire, contrairement à ceux qui se contentent de donner des leçons de morale. Nous vous apportons des connaissances pour que chacun apprenne à reconnaître les propos, les actes et les images qui perpétuent le racisme depuis deux siècles. Vous êtes jeunes, vous êtes la France de demain ; c’est vous qui dirigerez ce pays, c’est vous qui le construirez. Si vous voulez une France plus fraternelle que celle que nous vous offrons aujourd’hui, si les connaissances que nous vous apportons peuvent vous préserver de toutes les images et des propos que contient cette exposition, alors, grâce à une meilleure connaissance de notre histoire commune et au respect de vos différences, vous contribuerez à faire reculer le racisme ».

          Après cela, quel plaisir immense de voir des jeunes vous quitter comme ayant une mission à accomplir ! Merci à Monsieur le proviseur d’avoir pris le temps de venir assister à une séance de cette exposition-conférence de La France noire.

St-Germain févr. 2023Moment inoubliable dans la vie d’un conférencier : le lundi 20 février, un incident technique a retardé l’arrivée d’un groupe d’élèves à l’exposition-conférence. Évidemment, au moment où le conférencier entame le temps d’échange avec le groupe, la sonnerie met fin à la séance. La professeure demande alors aux élèves de se lever et de céder la place au groupe suivant. « Non madame, c’est intéressant ! On veut rester pour la suite !», crient-ils. Pour éviter la mutinerie qui s’annonçait, le conférencier propose aux élèves de les intégrer aux groupes qui passeront les deux jours suivants. Soulagés, ils quittent la salle avec des « mercis monsieur ». N’est-ce pas là une preuve du succès de cette exposition ?

Raphaël ADJOBI

TIRAILLEURS (un film de Laurent Vadepied avec la collaboration d’Omar Sy)

Tirailleurs affiche          Qui a dit que le passé colonial n’intéresse pas les Français au point d’entrer dans les manuels scolaires ? Tous ceux qui se mettent à trembler d’effroi ou à regarder ailleurs chaque fois que les jeunes sont invités à découvrir des pans méconnus de l’histoire de France impliquant les Africains-Français ont, à travers le succès du film Tirailleurs, l’occasion de réfléchir à ce besoin réel des Français. Nous formulons ici une prière : que ceux qui se considèrent comme les gardiens d’un temple national à préserver soient moins nombreux que les acteurs de la République ayant des idéaux à atteindre avec les jeunes générations. Une meilleure connaissance de notre passé commun doit être un devoir.

          Retenons tous que l’engagement d’Africains comme soldats au service de la France remonte aux premières implantations françaises en Afrique au XVIIIe siècle, précisément au Sénégal (Anthony Clayton, Histoire de l’armée française en Afrique, 1830-1962, Paris, Albin Michel, 1994). C’est d’ailleurs ce qui explique l’origine du mot Tirailleurs sénégalais même quand l’armée coloniale française englobera tous les combattants des territoires de l’Afrique coloniale française. Mais c’est officiellement en 1857 que le corps des Tirailleurs sénégalais est créé par un décret de Napoléon III. « Progressivement, à partir de 1859, les effectifs des Tirailleurs sénégalais deviennent plus importants pour aboutir à la création, en 1884, du premier régiment de Tirailleurs sénégalais, puis en 1892, à un second régiment de Tirailleurs » (Julien Fargettas, article La « Force noire » : mythes imaginaires et réalités in Des soldats noirs face au Reich, Puf, 2015). L’idée et la réalité d’une France noire – ou force noire – ne datent donc pas de 1914 : « dès 1870, des unités prussiennes et allemandes ont eu à combattre des troupes coloniales issues de l’empire français, nord-africaines et sénégalaises pour l’essentiel » (Johann Chapoutot, article Le nazisme et les Noirs : histoire d’un racisme spécifique in Des soldats noirs face au Reich, Puf, 2015).

          Cependant, indiscutablement, l’ampleur de l’engagement d’une force française d’Afrique sur le terrain européen en 1914 puis en 1940 n’a aucune commune mesure avec celle du XVIIIe ou du XIXe siècle. Cette fois, pour renforcer la contribution de ses colonies, la France recourt à une technique déjà pratiquée en Europe depuis le VIIIe siècle dans la traite des Slaves et quelques siècles plus tard pendant la traite des Africains : la rafle des populations. Cette vérité historique avait déjà été soulignée dans un précédent film aujourd’hui oublié : La victoire en chantant de Jean-Jacques Annaud (1976). Mais on constate, à la réaction du public stupéfait par la violence des premières images de Tirailleurs, qu’il n’était pas inutile de la rappeler. Oui, c’est la réalité qu’il faut avoir à l’esprit quand on parle de traite d’êtres humains, et notamment quand on parle de la traite ou déportation des Africains !

          Au-delà de la vie des soldats africains découvrant l’enfer des tranchées ainsi que la violence des combats avec des armes lourdes, le génie du réalisateur Mathieu Vadepied (avec la collaboration d’Omar Sy) réside incontestablement dans les dernières images qui questionnent tous les Français, ceux d’aujourd’hui comme ceux de demain. Désormais, en regardant l’Arc de Triomphe trônant dans Paris avec à ses pieds la tombe du soldat inconnu – Noir ? – chaque citoyen qui aura vu le film pensera à la contribution des Africains aux grands événements de l’Histoire de France.

          Tous les politiciens opportunistes qui avaient cru bon – une fois encore – drainer dans le sillage de leurs vociférations la France des ignorants contre le film en accusant Omar Sy de ne pas tenir compte de leur peau blanche qui les unit à d’autres populations d’Europe dont ils se sentent plus proches en toute circonstance, ceux-là doivent se trouver tout petits devant le grand intérêt des Français pour tous ces Français-Africains morts pour ce qui était leur « mère patrie ». Omar Sy a très bien fait de ne pas perdre son temps avec ces gens-là en les ignorant superbement.

Le point de vue de Laurent Veray, historien du cinéma :

          « Le film d’animation Adama de Simon Rouby (2015), un conte initiatique […] est, à ma connaissance, le premier film de fiction entièrement consacré à cette question des tirailleurs sénégalais pendant la Première Guerre mondiale, mais par le prisme d’un film d’animation et le regard d’un enfant. Depuis, il y a eu quelques documentaires à la télévision, un téléfilm aussi, mais au cinéma, il faut bien reconnaître que cette question avait été complètement ignorée. […] Ces questions de l’empire colonial français, des gens exploités durant ces périodes et dont les enfants, les petits-enfants participent de l’identité française, sont encore très fortes. […] Dans le domaine de l’imaginaire, dans le domaine culturel, parfois ces questions tardent [en d’autres termes, les autorités et les institutions comme l’Éducation nationale et les musées ne font rien pour instruire les populations sur ces questions]. Mathieu Vadepied a choisi le moment peut-être le plus propice pour faire son film. Quand je lis ses déclarations, on voit bien qu’il parle très souvent de portée politique de son film, plus que de questions historiques. Sans doute que les conditions de production étaient un peu plus difficiles, un peu longues [Tirailleurs a mis dix ans à se monter]. Ce qui a contribué à la concrétisation du projet, c’est sa rencontre avec Omar Sy. Il y a des producteurs, des gens qui ont participé à la réalisation de ce film, qui pensent qu’il peut jouer un rôle dans la société aujourd’hui. […] Il peut jouer un rôle dans la prise de conscience collective auprès du grand public de ces questions-là qui sont évidemment essentielles, fondamentales en termes de reconnaissance. Les troupes coloniales de l’époque ont été mobilisées pour se battre et défendre la « mère patrie ». Beaucoup de gens aujourd’hui l’ignorent. » (Extrait du site de France Culture).

Raphaël ADJOBI

Exposition : les « VUES IMPRENABLES » de Martin Etienne

Expo Dijon 2023 IV           Il est tout à fait malheureux de constater que des œuvres magnifiques peuvent passer inaperçues parce qu’insuffisamment mises en valeur par manque de vision élevée pour un affichage plus valorisant. Tous ceux qui – à Dijon (21) – ont eu l’occasion de découvrir les dessins de Martin Étienne peuvent témoigner de son magnifique talent d’analyste de notre société dite moderne. 

Expo Dijon fev. 2023 II          Bien sûr, son travail fait penser à Sempé. Mais quiconque s’arrête à cette figure du dessin humoristique du milieu du XXe siècle se fourvoie dangereusement ! Martin Étienne a l’esprit ancré dans ce XXIe siècle ! Tout en restant dans la lignée de son devancier, il est plus percutant, plus audacieux, en d’autres termes moins consensuel. C’est absolument Jean de La fontaine après Ésope. Une originalité incontestable grâce à un brin d’audace !

Expo Dijon fev. 2023L’exposition s’est déroulée du 8 septembre au 28 octobre 2022 au Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement de la Côte d’Or (1, rue de Soissons – 21 Dijon). Je pense sincèrement que des mairies gagneraient à inviter l’auteur de cet excellent travail afin que les uns et les autres apprennent à se regarder et à regarder la France d’aujourd’hui pour susciter des débats.

Expo Dijon 5Raphaël ADJOBI

La princesse Meghan Markle et le raciste

Meghan et Harry 3          Dans sa série d’émissions intitulée « La case du siècle », France 5 avait publié en avril 2021 un documentaire montrant une Meghan Markle en princesse différente, indépendante, rebelle. A l’image de Diana, elle était présentée comme une militante qui sait s’identifier à tous les sujets oubliés, en souffrance dans le royaume britannique. Il faut dire qu’enfant, Meghan admirait Diana.

Couple royal 5          Tous les médias assurent aujourd’hui qu’à son époque, Diana avait subi sans broncher les diktats du protocole pendant plusieurs années avant d’affirmer sa différence. Meghan par contre est allée beaucoup plus vite. Mais avec le temps, tout le monde comprend désormais qu’il ne s’agissait pas d’une simple imitation de l’idole de son enfance.

          Enceinte, elle a rejeté la tradition qui veut que chaque grossesse royale devienne une affaire publique. En effet, au terme de sa grossesse, Meghan a délaissé la clinique de prédilection de la couronne pour aller, discrètement, accoucher dans un hôpital méconnu du centre de Londres. Et après la naissance d’Archie, la princesse métisse a ignoré le sacro-saint rituel selon lequel tout nouveau petit prince doit être présenté aux sujets du royaume via les médias dès sa sortie de la maternité.

          On saura beaucoup plus tard que si Harry et Meghan ont refusé de présenter leur fils au public, c’est à cause du tweet posté par Danny Baker, un animateur de la radio BBC, quelques heures après sa naissance ; un tweet réduit à un photomontage représentant un singe entre un couple devant une maison censée être un hôpital avec ce titre : « l’enfant royal quitte l’hôpital ». Au XXIe siècle, un adulte – sans doute lui-même père de famille – est capable d’une telle ignominie pour faire rire ses compatriotes racistes. Pour paraphraser Édouard Louis, dans l’introduction de Retour à Reims de Didier Eribon (Flammarion, collect. Champs essais), c’était là le produit de toute une histoire de négrophobie, de centaines d’années de discours négrophobes qui avaient rendu possible et pensable cette image insultante produite par ce journaliste. Et comme le reconnaît Didier Eribon dans ce livre que tout le monde gagnerait à découvrir, « l’insulte est une citation venue du passé. Elle n’a de sens que parce qu’elle a été répétée par tant d’autres locuteurs auparavant ». On peut donc dire que ce photomontage est absolument, pour paraphraser un vers de Jean Genet, « Une image vertigineuse venue du fond des âges ».

Meghan et Harry contre le raciste          C’était le point d’orgue d’un racisme latent à l’égard du couple dans les médias et sur Internet. Dans le passé, dit le journaliste Max Forster (CNN), la tradition était d’ignorer ce genre de chose. Mais le couple a refusé d’accepter cela. « Ils ont fait bloquer le site sur le net. Ils ont passé du temps à chercher les trolls pour les empêcher de répandre leur haine. » Quinze jours après la naissance, sur l’insistance de la grand-mère Elizabeth II, Harry présente son fils nouveau-né aux voraces objectifs de la presse royale. Bien sûr, certains réactionnaires du royaume étaient impatients de savoir si Archie ressemblait à sa mère ou à son père, c’est-à-dire, s’il était plutôt Noir ou Blanc. En pensant encore une fois au parcours de Didier Eribon, je formule cette question : n’est-ce pas terrible pour Harry et Meghane de savoir que leur fils, un quarteron, « est précédé par une identité stigmatisée » qu’il vient à son tour en ce monde habiter et incarner et avec laquelle il lui faudra se débrouiller d’une manière ou d’aune autre ? On comprend alors pourquoi le service de la présentation officielle de l’enfant fut minimun. La rupture était consommée !

Lady Suzan Hussey et Mme Fulani 2 v          Ce que tout le monde ne savait pas et que va révéler le couple princier plus récemment, c’est qu’avant la venue au monde d’Archie, des membres de la famille royale s’étaient inquiétés de la couleur de peau du futur prince ! Par ailleurs, le prince Harry lui-même a confirmé le fait que les commentaires racistes dans la famille royale sont bien connus. Bien sûr, le privilège des Blancs à l’égard des Noirs est le même que s’octroient les riches, les aristocrates et les bourgeois à l’égard des pauvres ; ils ne voient que ce qu’ils veulent voir, alors que les autres doivent tout voir (Erri de Luca – Le jour avant le bonheur, Ed. Gallimard). Ne dites jamais que ces catégories de personnes n’ont pas conscience d’être des privilégiés ; l’impunité dont ils jouissent en est la preuve suffisante. En novembre 2022, la marraine du prince William – Lady Susan Hussey – a été reconnue par Charles III raciste à l’égard d’une artiste britannique noire invitée à une réception officielle au palais. Aussi, selon le prince Harry, quand les journalistes assurent qu’il y a eu toujours des liens conflictuels entre la famille royale et les journalistes, il faut regarder cela de plus près. « Ce qui arrive à ma femme, à nous – s’indigne-t-il dans un récent entretien – arrive à tellement de gens à cause de la presse britannique, et cela à cause du racisme, à cause du colonialisme, à cause des mensonges ! […] Certaines des choses qui ont été dites sur ma femme ont été condamnées par le palais de Buckingham ; mais elles venaient du palais ! Elles ont été servies aux journalistes sur un plateau ». C’est clair et net ! Dès lors, chacun peut établir un lien étroit entre la crainte d’un prince noir manifestée au palais et le montage insultant de la photo réalisé par le journaliste de la BBC.

Raphaël ADJOBI

Exposition photographique « Décadrage colonial » au Centre Georges Pompidou

Fabien Loris - encre 1932          Jusqu’au 27 février 2023, se tient au Centre Georges Pompidou une exposition photographique – intitulée Décadrage colonial – sur un pan de l’histoire coloniale de la France : celui de la réaction du mouvement surréaliste à l’exposition coloniale de 1931 à Paris.

          Comme l’intervenant de l’association La France noire le dit souvent à ses jeunes interlocuteurs lors de ses interventions dans les collèges et les lycées, on ne peut pas comprendre les images et les arguments esclavagistes, racialistes et colonialistes, si on ne prend pas en compte un fait primordial : celui que tous les Européens n’étaient pas esclavagistes, racialistes et colonialistes ! C’est en effet de la confrontation et du débat contradictoire que nous tenons les plus belles pages des bêtises du genre humain à travers la théorisation de l’humanité en races distinctes, celle de la nécessité d’acheter ou de vendre des humains, et enfin celle du devoir de civiliser l’Autre. C’est donc clairement à partir de la volonté de se justifier face à leurs adversaires qu’esclavagistes, racialistes et colonialistes ont modifié la pensée européenne et mondiale sur l’Autre.

Les Français de couleurs          Ce que l’on apprend essentiellement dans cette exposition du Centre Pompidou, c’est la dénonciation par le mouvement surréaliste de la politique impérialiste de la France par l’organisation d’une contre exposition intitulée « La vérité sur les colonies ». Combien de Français, combien de professeurs d’histoire le savaient-ils ? Et pourtant, « En 1931, lors de l’exposition coloniale de Vincennes, les surréalistes diffusent des tracts et dénoncent les répressions à l’égard des populations colonisées. Plusieurs numéros du Surréalisme au service de la révolution exposent leur vision radicalement critique de l’entreprise coloniale dans sa dimension tant économique qu’intellectuelle et culturelle » (le catalogue de l’exposition).

          Décadrage colonial montre donc un chapitre du combat du mouvement surréaliste et de son iconographie subversive (photographies, productions graphiques et photomontages militants) contre l’impérialisme français, tout en soulignant les rapports équivoques des photographies des premiers ethnologues – jusque là tenus sous le joug du puritanisme chrétien européen – qui font preuve d’un voyeurisme débridé sous le vocable d’« images exotiques ».

Tract mai 1931Raphaël ADJOBI

Le collège Saint-Grégoire du groupe ECBG (45) accueille « La France noire » pour la troisième fois

LFN 3 membres - bleu          Le collège Saint-Grégoire – qui fait partie de l’Enseignement Catholique Beauce Gâtinais (ECBG) – a accueilli notre exposition Les résistances africaines à la traite et les luttes des esclaves pour leur liberté dans les Amériques pour la deuxième fois le vendredi 20 janvier 2023. Notre première visite dans cet établissement avec cette exposition date de 2018. En 2019, avant les deux années de la COVID, ce collège avait permis à tous ses élèves (de la 6e à la 3e) de découvrir notre exposition L’invention du racisme et la négation des traces de l’homme noir dans l’histoire de l’humanité. Cette dernière visite avait donc un air de retrouvailles pour bon nombre de professeurs comme pour les invités.

Pithiviers coupé 2          Avouons-le tout de suite : si l’initiative de cette nouvelle invitation a cette fois été prise par notre collègue Pierre-Louis Boggio, professeur d’histoire, nous retrouvions-là notre amie et membre de La France noire Inès Kihindou – Liss pour les intimes, les blogueurs et les milieux littéraires. Durant toute la journée, nous avons été pris en charge par notre collègue documentaliste qui a également organisé l’accueil des élèves pour les séances d’intervention du conférencier. Merci à elle pour le bel accueil et le bon moment passé ensemble.

Pithiviers coupé          Ce fut une journée très agréable avec des élèves intéressés donc attentifs aux explications de l’intervenant qui leur apportait des compléments de connaissances à leur cours sur l’esclavage. Aller au-delà des manuels scolaires en élargissant les connaissances des jeunes grâce à notre exposition était en effet la volonté du professeur d’histoire qui l’avait beaucoup appréciée en 2018. C’est donc avec fierté que ce collègue a suivi les réactions de ses élèves par rapport aux images des panneaux qui ne peuvent laisser indifférents. Ce plaisir était partagé par les enseignants qui découvraient pour la première fois cette exposition qu’ils jugent absolument nécessaire à l’instruction de la jeunesse.

St-Grégoire 2023          Pari gagné donc pour notre amie Liss Kihindou qui, en 2018 et 2019, a eu l’idée d’inviter La France noire dans son établissement pour faire découvrir à ses collègues d’autres supports de transmission des savoirs. Désormais, l’équipe pédagogique du groupe ECBG sait qu’elle trouvera auprès de La France noire les outils pédagogiques qui accompagneront utilement et agréablement ses pratiques éducatives.

Raphaël ADJOBI

Le lycée Benjamin Franklin (Orléans) accueille pour la deuxième fois notre exposition sur l’invention du racisme

Orléans Benjamin Franklin          Le succès rencontré, en janvier 2022, au lycée Benjamin Franklin par notre exposition « L’invention du racisme et la négation des traces de l’homme noir dans l’Histoire de l’humanité » est indéniable ! La preuve, au moment de nous accueillir en janvier 2023, ces mots des professeurs documentalistes – les animateurs culturels de l’établissement chargés de proposer des actions complémentaires aux enseignements des professeurs : « Nous avons diffusé l’information de votre prochaine venue en fin de semaine, et cette fois encore, en quelques heures, vous étiez, comme on dit, prêts à jouer àguichet fermé” ! »

          C’est donc avec plaisir que nous avons retrouvé dans cet établissement scolaire des visages désormais familiers pour partager la belle complicité des passeurs de savoirs autour de notre exposition sur l’invention du racisme. Le jeudi 12 et le vendredi 13 janvier, neuf classes ont bénéficié de la rencontre avec le conférencier de notre association pour un temps de présentation puis de découverte de l’exposition, et enfin un temps d’échange. Curieux et attentifs, les élèves ont chaque fois exprimé leur étonnement et leur indignation devant les images illustrant les arguments qui ont servi à établir une échelle de valeurs entre les humains à partir des différences de couleur de leur peau. Les applaudissements qui ont clôturé chacune des rencontres peuvent être considérés comme la marque de la parfaite adhésion des élèves aux explications du conférencier. Un détail très plaisant : chaque fois, certains élèves ont tenu à venir le remercier. Quant aux enseignants, ils n’ont pas manqué de montrer leur satisfaction et parfois même leur enthousiasme devant la prestation vivante du conférencier.

Orléans 2023 élèves          C’est la cinquième année consécutive que le lycée Benjamin Franklin invite notre association. Et c’est la deuxième fois qu’il accueille L’invention du racisme et la négation des traces de l’homme noir dans l’Histoire de l’humanité, après avoir reçu durant trois années Les Noirs illustres et leur contribution à l’Histoire de France. Nous avons été très heureux d’apprendre des professeurs documentalistes que nos travaux et nos conférences ont modifié les pratiques pédagogiques des enseignants qui ont intégré nos thématiques à leurs cours. Aussi, ceux-ci aimeraient disposer de nos expositions plus longtemps ; ils aimeraient surtout une organisation différente de l’accueil des expositions afin d’y travailler avec les élèves avant la venue du conférencier.

          Que dire de plus sinon que nous avons là la preuve de la reconnaissance par nos collègues de l’utilité de nos expositions dans l’instruction des jeunes générations !

          Pour terminer, signalons un résultat réjouissant du dispositif Pass culture permettant à l’Éducation nationale de prendre en charge les interventions des acteurs culturels qu’elle a homologués : cette année, les professeurs documentalistes du lycée Benjamin Franklin envisagent d’offrir – aux frais de l’État – une deuxième exposition de La France noire aux enseignants et à leurs élèves. Les sections professionnelles et technologiques ayant l’esclavage à leurs programmes pourraient bientôt accueillir notre exposition Les résistances africaines à la traite et les luttes des esclaves pour leur liberté dans les Amériques. C’est donc le deuxième lycée qui va accueillir, en cette année 2023, deux expositions de La France noire.

Raphaël ADJOBI

Les malheurs des filles de Thomas Jefferson (3e président des E.U)

Thomas Jefferson          Dans son édition de mars 1971, la revue Connaissance des arts avait publié un article sur la belle maison du troisième président des États-Unis, Thomas Jefferson, construite à Monticello, en Virginie, à 120 km de Washington. Une lectrice saisit alors l’occasion et envoya à la revue l’extrait suivant de «La République américaine» du R.P. Bruckberger (Paris 1958, p. 84-86) et permit ainsi au public de découvrir, dans le numéro suivant, une image singulière de la vie de cet homme d’État – même s’il s’agit en réalité de celle de ses descendantes.

          « Avec un sens extraordinaire des lois de la tragédie, la vie se charge parfois de donner une conclusion exemplaire à une destinée exemplaire. On sait ce qu’il advint de Saint-Just. Il monta lui-même sur l’échafaud où il avait d’abord envoyé Danton : la République de Sparte rejoignait dans le panier à son la République de Cocagne.

          Quant à Jefferson, l’épilogue tragique digne du Shakespeare le plus terrifiant, ne devait survenir qu’après sa mort. Je cite ici sans changer ou omettre un seul mot, un homme dont l’information, l’autorité et la conscience sont irrécusables. Il s’agit d’Alexandre Ross, canadien de nationalité et qui occupa des charges importantes dans son pays, et fut en plus l’ami personnel et homme de confiance d’Abraham Lincoln. Il écrit dans ses mémoires :Thomas Jefferson, l’auteur de la Déclaration d’indépendance, par une clause de son testament conféra la liberté à ses enfants naturels nés esclaves. Il le fit dans la mesure où le code d’esclavage de Virginie le lui permettait, suppléant au pouvoir qui lui manquait par une humble requête à la législature de Virginie de confirmer ses dispositions testamentaires et de donner à ces esclaves la permission de demeurer dans l’État où ils avaient leur parenté. Deux de ses filles, qu’il avait eues d’une de ses esclaves octavonnes, furent, après la mort de Jefferson, emmenées de Virginie à la Nouvelle-Orléans où elles furent vendues au marché d’esclaves pour 1500 dollars chacune et utilisées à des fins qu’on ne peut décemment rapporter. Ces deux malheureux enfants de l’auteur de la Déclaration d’indépendance étaient très blanches, leurs yeux étaient bleus et leurs chevelures longues et soyeuses étaient blondes. Toutes deux avaient une grande instruction et une parfaite éducation. La plus jeune des deux sœurs, s’enfuit de chez son maître et se suicida par noyade pour échapper aux horreurs de sa condition. Ce n’est pas sans une immense tristesse qu’on rencontre un tel fait dans l’histoire d’une nation…. Jefferson avait raison. On n’en a jamais fini de conquérir la liberté. La République selon son cœur serait une révolution permanente ».

 Deux remarques s’imposent :

1 – Afin de bien comprendre la volonté de l’auteur de souligner l’ampleur du racisme dans le coeur de certains Blancs, il est nécessaire de s’arrêter au sens du mot « Octavon ». Voici la définition des dictionnaires (ici le Larousse) : Personne issue de parents dont l’un est quarteron et l’autre un Blanc. Notez bien la distinction « quarteron » et « Blanc ». Qu’est-ce qu’un « Quarteron » ? Réponse : « Fils ou fille d’un Blanc et d’une mulâtresse (métisse) ou d’une Blanche et d’un mulâtre (métis) » (Le Robert). Dire qu’un métis n’est pas un Blanc, tout le monde comprend. Mais en distinguant « quarteron » et « Blanc », comme le font les dictionnaires, on arrive à la conclusion que le célèbre écrivain Alexandre Dumas et mes petits-enfants qui sont quarterons (un de leurs parents est métis) ne sont pas des Blancs.

En clair, un « octavon » (un des parents est quarteron) est une personne à la peau blanche née de deux parents à la peau blanche – comme les enfants de l’écrivain Alexandre Dumas ; mais on garde en mémoire que l’un des grand-parents est métis. En d’autres termes, vous êtes blanc de peau parce que vos deux parents sont blancs de peau, mais vous n’êtes pas Blanc parce que vous êtes un « octavon ». Selon les dictionnaires, si vous vous mariez, on dira que vous êtes marié avec une Blanche ; vous aurez alors compris par cette simple mention que vous n’êtes pas un Blanc, malgré votre peau blanche. A l’époque de Thomas Jefferson, vos enfants pouvaient être vendus ; car vous êtes un « esclave octavon ». Les petits-enfants du célèbre écrivain Alexandre Dumas pouvaient être vendus comme les filles de Thomas Jefferson ! Tous les Noirs français qui ont des arrière-petits-enfants octavons ne peuvent que trembler en lisant ce texte. Qu’ils retiennent avec Thomas Jefferson que la République doit être une révolution permanente pour que le racisme ne les rattrape pas.

Cheveux blonds 12 – Il est toujours plaisant d’entendre ou de lire les Blancs qui, tout en soulignant la blancheur de la peau de certaines personnes, y associent avec un grand soin les yeux bleus ainsi la chevelure blonde comme les marques suprêmes de la blanchité ou de la « race » blanche. C’est exactement ce préjugé qu’exprime l’auteur du texte en écrivant « Ces deux malheureux enfants […] étaient très blanches, leurs yeux étaient bleus et leurs chevelures longues et soyeuses étaient blondes ». Et pourtant, une chevelure blonde et des yeux bleues n’ont jamais été des marques exclusives et donc distinctives des Européens blancs !

Yeux bleus 4

Trois femmes aux yeux bleusRaphaël ADJOBI